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Développer le travail pénitentiaire
Publié le 05 avril 2023 - Mis à jour le 16 mai 2023
Des avantages pour les entreprises, un bénéfice pour la société
Le 4 avril 2023, Éric Dupond-Moretti, garde des Sceaux, s’est rendu au centre pénitentiaire de Bois-d’Arcy. Après avoir visité des ateliers, le ministre de la Justice a échangé avec une soixantaine de chefs d’entreprise sur l’intérêt de développer le travail pénitentiaire.
Un « tour de France » du travail pénitentiaire
Le 4 avril 2023, Éric Dupond-Moretti s’est rendu au centre pénitentiaire de Bois-d’Arcy. Ce moment marque la première étape d’un « tour de France » du travail en détention. Besançon, Valence, Marseille, Rennes ou Ducos (Martinique)… À cette occasion, des chefs d’entreprise, partenaires sociaux, associations et structures d’insertion ont été invités à venir échanger avec le ministre de la Justice sur la nécessité de développer le travail pénitentiaire, ceci dans l’intérêt de tous. Certains d’entre eux ont témoigné de leur engagement et de leur expérience réussie du travail en détention, voire du recrutement d’anciens détenus travailleurs (dont le Groupe M6, Cora, Carrefour, Emmaüs, l’Atelier des chefs, ProEngin…). En effet, le travail en détention est bénéfique pour la personne détenue, sa ou ses victimes, mais aussi pour les entreprises et la société.
« Il nous faut développer la formation professionnelle et le travail en détention. Ce sont des enjeux humanistes sociétaux que je porte chevillés au corps, a déclaré le ministre de la Justice devant une soixantaine de chefs d’entreprise (CAC 40, PME, TPE) et le président du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux. L’objectif que je poursuis est clair : au moins 50 % des personnes détenues doivent avoir une activité professionnelle rémunérée. »
Ils ont choisi le travail pénitentiaire : Nespresso, le Wake up café, l’Institut national de l’audiovisuel, Safran, Yoti, L’Atelier des chefs, ProEngin…
Le travail en détention : une voie vers la réinsertion
Au centre pénitentiaire de Bois-d’Arcy, le garde des Sceaux a inauguré l’atelier Yoti où huit personnes détenues reconditionnent des jeux et des jouets usagés. Les objets sont ensuite disponibles sur la boutique en ligne de Yoti et sur le site de Label Emmaus.
En avril 2022, la société Yoti a obtenu, le Label PePs - Produit en Prison.s - délivré par l’Agence du travail d’intérêt général et de l’insertion professionnelle (ATIGIP) pour des produits et services fabriqués en prison dans des conditions inclusives et responsables. En octobre 2022, 23 entreprises étaient labellisées Peps.
Travailler permet à la personne détenue de préparer sa réinsertion. Elle apprend, se qualifie, se conforme à une discipline : autant d’éléments qui lui permettent de mieux préparer sa sortie de détention.
Depuis une vingtaine d’années, on constate une baisse du nombre de détenus travailleurs. En 2022, leur nombre était d’environ 30 %. C’est pourquoi le garde des Sceaux a engagé une série d’actions pour redynamiser le travail pénitentiaire. Il a notamment signé une convention avec Régions de France pour que les exécutifs régionaux développent la formation professionnelle en détention.
Autre axe majeur, le contrat d’emploi pénitentiaire conclu entre la personne détenue et le donneur d’ordre (chef de l’établissement pénitentiaire ou entreprise). Instauré le 1er mai 2022, il permet à la personne détenue de travailler dans desconditions similaires à celles qu’elle connaîtra une fois libérée : procédure de recrutement, contrat de travail, période d’essai, ouverture de droits sociaux, formation professionnelle.
Ce nouveau cadre juridique permet de mieux préparer les personnes détenues à redevenir des citoyens autonomes et responsables.
« J’ai donné un véritable cadre au travail pénitentiaire en mettant en place un contrat d’emploi pénitentiaire et en ajoutant des droits sociaux, mobilisables essentiellement à la sortie de détention, dès lors qu’ils sont utiles à l’insertion des personnes qui passent par la case prison », indique Éric Dupond-Moretti.
Le travail pénitentiaire : des avantages pour l’entreprise
« Ce cadre normatif rénové […] renforce, par ailleurs, l’attrait du travail pénitentiaire pour les entreprises, poursuit le garde des Sceaux. Les cotisations patronales pour les assurances vieillesse et chômage seront désormais à la charge de l’État. […] Les locaux de production sont mis à disposition gracieusement. »
Le coût du travail réalisé en prison est aussi moins onéreux (45 % du SMIC) pour les entreprises car les contraintes du milieu carcéral impactent la productivité (le temps de déchargement par exemple).
Néanmoins, certaines entreprises choisissent de rémunérer les détenus au-delà du seuil minimum de rémunération parce qu’elles considèrent que les avantages dont elles bénéficient (gratuité des locaux, flexibilité, vivier disponible en cas de surplus d’activité…) compensent ces contraintes.
Par ailleurs, le travail pénitentiaire permet à l’entreprise de favoriser les circuits courts et ainsi de préserver l’emploi sur le territoire. Enfin, en conservant les chaînes de production sur le territoire, l’entreprise réduit l’impact de son empreinte environnementale.
Le travail pénitentiaire : un bénéfice pour la société
Favoriser l’insertion professionnelle est aussi bénéfique à la collectivité puisque cela permet de réduire les risques de récidive. Plusieurs études internationales, européennes et françaises montrent que les personnes qui ont travaillé en prison récidivent moins.
En recourant au travail en prison, l’entreprise contribue à lutter contre la récidive et s’engage en faveur d’une société plus sereine.
Une personne détenue qui travaille en prison a toutes les chances de se réinsérer à l’issue de l’exécution de sa peine et d’être capable d’indemniser les victimes.
Le travail pénitentiaire représente donc un intérêt majeur pour la personne détenue qui dispose d’un revenu minimum et de perspectives ; pour l’entreprise qui y trouve des avantages économiques et contribue à l’apaisement de la société.
Le travail pénitentiaire : comment ça marche ?
Le travail pénitentiaire s’organise notamment autour de deux régimes :
- le service général : les personnes détenues travaillent à l’entretien des locaux ou au fonctionnement de la vie en détention (cuisine, buanderie, cantine, etc…). Elles sont réparties par niveau de qualification ou de compétences ;
- la production : les personnes détenues travaillent dans les ateliers pénitentiaires, pour un donneur d’ordre, qui est soit une entreprise concessionnaire, une entreprise délégataire (titulaire d’un marché de gestion déléguée), l’ATIGIP (service de l’emploi pénitentiaire - SEP), une structure d’insertion par l’activité économique (SIAE), ou encore une entreprise adaptée.
La rémunération dépend du régime et du type de poste occupé :
- 45 % du SMIC horaire brut pour les activités de production ;
- 33 %, 25 % ou 20 % pour le service général selon la classe dont relève le poste.
Le recrutement se déroule de la façon suivante :
- l’autorisation à travailler (appelée classement) est prononcée par le chef d’établissement, sur avis de la commission pluridisciplinaire unique (CPU). Le chef d’établissement ne peut refuser le classement que pour des motifs liés à la sécurité ;
- l’autorisation est suivie d’un entretien professionnel avec un donneur d’ordre, chargé de recruter le candidat sur l’un des postes qu’il encadre ;
- le chef d’établissement affecte le candidat retenu par le donneur d’ordre sur le poste :
- la personne détenue signe un contrat d’emploi pénitentiaire avec le donneur d’ordre. Ce contrat définit les droits et obligations des parties. Il doit préciser s’il est à durée déterminée ou indéterminée.