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Egalité femmes/hommes en Guyane :

Publié le 12 août 2019

L'enjeu de l'accès au droit

Peu de trains, peu de cars et souvent des dizaines ou centaines de kilomètres à parcourir avant d’atteindre le tribunal, parfois même en pirogue, pour une partie du voyage ...

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Permettre pourtant aux femmes de porter plainte en cas de violence, les aider, les orienter, les protéger ...Des réflexes sont à instiller, des freins doivent être levés afin de garantir, partout, une égalité d’accès au droit ainsi qu’une égalité de tous devant la loi. S’appuyer sur ce qui fait lien entre les êtres, au-delà  de leurs différences, paraît  primordial.  La loi républicaine constitue, à ce titre, un  ciment entre les individus. S’agissant, en particulier, de la protection des femmes et des fillettes, la loi ne peut, nulle part, être négociée. Transcendant les mœurs et les cultures, elle doit être respectée, sur le territoire national, à tous les niveaux et dans toutes les sphères - publique et privée-  que l’on vive en métropole ou outre- mer.

À Cayenne et à Saint Laurent du Maroni, les rencontres nombreuses de la haute-fonctionnaire avec les professionnels de la justice, de la préfecture et de la police, du travail social des représentantes du monde associatif et des universitaires ont confirmé cette nécessité.

Elle a précisément constaté l’implication de la cour d’appel pour développer l’accès au droit et renforcer la lutte contre les violences faites aux femmes. La mise en place de « pirogues du droit » allant à la rencontre des habitants et celle, prochaine,  de conciliateurs de justice, ou encore l’attribution des premiers téléphones grave danger constituent des avancées significatives.

Sur ce territoire où l’isolement peut être une cause d’aggravation des situations de danger pour les femmes victimes de violences conjugales, la haute-fonctionnaire a aussi pu mesurer l’intérêt majeur de liens tissés entre la justice et le réseau associatif, en première ligne dans l’accueil et l’accompagnement de celles-ci. L’action de l’association l’Arbre fromager, est, à ce titre remarquable. Celle-ci s’articule pleinement avec celle de l’association d’aide aux victimes, très soutenue par la cour d’appel de Cayenne, ainsi qu’en témoigne Lydia Beaubera, cheffe de cabinet des chefs de cour.

Ce lien privilégié avec le réseau associatif s’exprime aussi à l’occasion des journées symboliques du 25 novembre- journée de lutte contre les violences faites aux femmes- et du 8 mars- journée internationale des droits des femmes- dont l’organisation est coordonnée par Christine Da Luz, magistrate déléguée à la communication, toujours soucieuse de la qualité du partenariat entretenu par l’institution judiciaire avec ses interlocuteurs locaux.

En compagnie de Marie-Laure Piazza, première présidente, de Francis Nachbach, procureur général et de Sophie de Borggraeff, secrétaire générale de la  première présidence, Isabelle Rome a également échangé avec les magistrats et les personnels de greffe du TGI de Saint-Laurent du Maroni.  Elle a pu  découvrir la réalité de l’exercice de leurs missions et perçu le sens élevé de l’intérêt général que celui-ci requiert de leur part. Au bord du fleuve qui sépare la Guyane du Surinam, dans cette ville située à plus de quatre heures de route de Cayenne, présentant de surcroît une offre locative très onéreuse,  les conditions de travail sont compliquées et l’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle ne va pas de soi. 

Sur ce sujet- qui fait partie de sa feuille de route- la haute fonctionnaire s’est engagée à apporter une attention toute particulière. Elle s’attachera ainsi à explorer les pistes d’actions susceptibles d’être renforcées ou mises en oeuvre, en direction des personnels affectés dans les départements ou territoires d’outre-mer.

D’autres moments forts ont marqué la visite d’Isabelle Rome en Guyane, tel celui partagé autour du thème de l’égalité femmes/hommes, avec des jeunes mineurs suivis par la PJJ et accueillis par un couple dans une maison «  lieu de vie » au cœur de la forêt équatoriale, ou celui passé au quartier des femmes, au centre pénitentiaire. Elles y sont nombreuses. Les lieux sont vétustes et surpeuplés. Jusqu’à huit détenues peuvent partager une même cellule.

Dans un siège pliant, posé sur le tapis de jeu de la cour de promenade, un bébé de dix-huit jours attire les regards de toutes. Il est né ici, dans une cellule ...  C’est une surveillante, volontaire et courageuse, qui l’a mis au monde. Dans quelques semaines, des travaux amélioreront les conditions d’hébergement au sein de la nursery. Des enfants pourront y restés près de leur mère jusqu’à l’âge de dix-huit mois.

A la DTPJJ, et sous la houlette de Patricia Viator, la haute-fonctionnaire a présenté ses missions à des éducateurs et à des personnels de la direction et répondu à leurs questions, alors qu’entre les murs du centre pénitentiaire, représenté  en sa direction par Jean-Christophe Lagrange, les  débats organisés par Roland Geneviève, directeur du SPIP, ont permis de sensibiliser Isabelle Rome sur le profil des femmes qui y sont incarcérées, ainsi que sur la prévention de la récidive des auteurs de violences conjugales et la justice restaurative. Des agents ont attiré son attention sur les agressions commises à l’encontre de surveillantes par des détenus, et sur le soutien qui doit leur être apporté.  

Ayant rencontré les sous-préfets de Saint-Laurent du Maroni et de Cayenne, la haute-fonctionnaire a pu leur exposer les grands axes du ministère de la justice dans le domaine de la lutte contre les violences faites aux femmes, notamment celui développé, avec l’ENM, en matière de formation. Elle en a évoqué, en particulier, la dimension déconcentrée et pluridisciplinaire. Des journées ayant vocation à s’adresser aux magistrats, aux personnels de l’AP et de la PJJ, mais aussi aux OPJ, aux avocats et aux représentants associatifs, seront organisées dès l’automne 2019, à l’échelon régional. Ce pourra donc être le cas en Guyane.    

A la suite de ces échanges, la BAC a accueilli Isabelle Rome, pour une patrouille, au cœur des bidonvilles de Cayenne. Grâce au dialogue instauré sur place avec les policiers, elle a pu discuter avec des mamans, des adolescentes, et des jeunes prostituées. L’occasion de  constater, une fois de plus- et ici, très nettement- combien  le respect et la protection des femmes victimes de violences pouvaient avoir destins liés avec la possibilité d’un égal accès au droit pour tous, clé de voûte d’une République, une et indivisible.