[Archives] Décentralisation et aux collectivités d'outre-mer
Publié le 16 octobre 2002
Présentation au Conseil des ministres du projet de loi constitutionnel
Dominique PERBEN, Garde des Sceaux, ministre de la Justice présente au conseil des ministres du 16 octobre 2002 un projet de loi de révision constitutionnelle visant à consacrer la décentralisation des collectivités territoriales (régions, départements, communes) et à renforcer leurs pouvoirs et leur autonomie financière.
La tradition française est celle d’un État unitaire et décentralisé. Si nos concitoyens restent attachés à ces caractéristiques essentielles de la République, ils souhaitent en même temps disposer d’une plus grande liberté pour gérer les affaires locales.
La difficulté de réformer l’État est aussi, parfois, ressentie comme un archaïsme.
C’est pourquoi, conformément aux engagements du Président de la République, le Gouvernement a décidé une profonde modernisation des pouvoirs de l’État et des collectivités territoriales visant à introduire plus de décentralisation.
S’agissant des collectivités d’outre-mer, le projet leur donne un cadre institutionnel qui leur offre, tout à la fois, la souplesse que leurs spécificités requièrent et l’attachement à la République dont elles témoignent.
Cette révision constitutionnelle permettra le dépôt au Parlement au début de l’année 2003 d’un projet de loi opérationnel de décentralisation et d’expérimentation locale.
Ce projet de révision constitutionnelle :
Reconnaît l’organisation décentralisée de la République et en tire les conséquences sur la répartition des compétences entre l’État et les collectivités territoriales (principe de subsidiarité).
Le projet de loi modifie l’article premier de la Constitution qui définit les valeurs fondamentales de la République (caractère indivisible de la République, principe d’égalité des citoyens devant la loi).
Tout en réaffirmant le principe selon lequel la République française est une et indivisible, le texte fonde les rapports entre l’État et les collectivités territoriales sur l’idée que chacun doit faire ce qu’il est le mieux à même de faire. Il introduit un principe de "subsidiarité à la française" pour échapper à l’idée toujours présente dans les esprits que tout procède de Paris. Le projet de loi consacre ainsi l’aboutissement d’un demi siècle d’évolution institutionnelle.
Consacre l’existence et le rôle de la région, devenu au fil des ans un niveau d’administration incontournable.
Il donne une existence constitutionnelle à la région : elle se trouve inscrite au rang des collectivités territoriales au même titre que les départements et les communes.
Ouvre une faculté d’expérimentation aux collectivités territoriales comme à l’État .
Il apparaît indispensable d’adapter notre cadre constitutionnel pour mieux tenir compte des spécificités et des initiatives locales. Aujourd’hui, la Constitution ne permet pas aux collectivités d’intervenir, même à titre expérimental, dans le champ de compétence du législateur.
Le projet de loi permet de mettre en oeuvre des politiques publiques sur une portion limitée du territoire national et d’en réaliser l’évaluation au bout d’un certain délai.
- Pour les collectivités locales, aujourd’hui contraintes par le cadre législatif et réglementaire défini par l’autorité centrale, ce nouveau droit d’expérimentation leur permettra; d’initier des réformes dans leur domaine de compétence propre, qui, évaluées sur la base de tests " grandeur nature ", pourront un jour profiter à tous.
- Pour l’État, le fait de confier l’expérimentation d’une réforme à certaines collectivités vise à tester l’efficacité et les conséquences de politiques publiques nationales, avant de les généraliser par voie législative, de les modifier ou de ne pas y donner suite. L’État sera ainsi mieux à même de conduire les évolutions nécessaires à la vie quotidienne des Français en fonction des réalités constatées sur le terrain.
- De même, dans son domaine d’activité propre, l’État pourra tester des idées nouvelles avant de les généraliser.
Garantit l’autonomie financière des collectivités territoriales.
Aujourd’hui, notre Constitution ne consacre pas explicitement l’autonomie financière des collectivités territoriales.
Le projet de loi reconnaît aux collectivités territoriales la faculté de recevoir tout ou partie des impositions de toute nature. Les collectivités territoriales pourront ainsi percevoir des impôts locaux et se voir transférer une partie des impôts nationaux. Mais leurs recettes propres doivent représenter une part déterminante de l’ensemble de leurs ressources. Une loi organique fixera les conditions dans lesquelles cette règle est mise en oeuvre.
La Constitution leur permettra de fixer, dans les limites définies par la loi, le taux et l’assiette de ces différents impôts. Les inégalités de ressources entre collectivités seront corrigées notamment par un système de péréquation financière.
Développe, au plan local, la faculté d’expression directe des citoyens.
La décentralisation doit s’accompagner d’une plus large faculté d’expression directe donnée aux citoyens. Le projet propose d’inscrire dans la Constitution le droit pour les collectivités locales d’organiser auprès de leurs électeurs des référendums décisionnels (et non simplement consultatifs) sur des questions relevant de leur compétence.
Un droit de pétition sera également reconnu aux citoyens pour faire inscrire à l’ordre du jour de l’assemblée délibérante de leur collectivité une question relevant de sa compétence.
Ouvre la possibilité d’assouplir le régime des départements et des régions d’outre-mer.
Le régime des départements et des régions d’outre-mer reste celui de l’assimilation législative. Le projet ouvre la possibilté d’assouplir ce régime, en considération de leurs caractéristiques et contraintes particulières, de manière à leur permettre de fixer eux-mêmes des adaptations aux lois et règlements, voire en certaines matières et sous certaines conditions, de déroger à ces mêmes lois et règlements.
Consacre le statut des autres collectivités territoriales d’outre-mer.
Pour chacune de ces collectivités, actuels T.O.M., un statut particulier est prévu, fixant, en vertu d’une loi organique, les conditions dans lesquelles les lois et règlements y seront applicables, ainsi que l’organisation spécifique de ces institutions. Des règles particulières seront prévues pour les collectivités d’outre-mer qui seront dotées de l’autonomie.
Toute évolution statutaire fondamentale devra être approuvée par les électeurs.
Voir également le dossier de presse du 16 octobre 2002