[Archives] Commission nationale de suivi de la détention provisoire

Publié le 13 septembre 2005

Intervention de Pascal CLEMENT lors de l'installation de la Commission

Temps de lecture :

5 minutes

Messieurs les parlementaires,

Mesdames, Messieurs,

Je vous remercie de votre présence et vous souhaite la bienvenue au ministère de la justice.

Vous êtes ici réunis parce que vos compétences, votre connaissance et votre expérience des questions judiciaires, votre sensibilité aux délicats sujets de la détention provisoire et de la liberté, vous désignaient tout naturellement pour composer la Commission de suivi de la détention provisoire instituée par l’article 72 de la loi du 15 juin 2000.

Je vous remercie très sincèrement d’avoir accepté ces fonctions.

Fonctions que, pour certains, vous allez exercer pour la première fois. Je souhaite donc la bienvenue à M. le député Emile BLESSIG, et à M. le sénateur François Noël BUFFET. Vous apporterez tous les deux votre connaissance des questions juridiques. M. BUFFET, en tant qu’avocat, vous connaissez évidemment parfaitement ce sujet. M. BLESSIG, vous avez démontré votre intérêt pour les questions concernant les conditions de détention, en alertant notamment la chancellerie sur la situation du centre pénitentiaire d’Oermingen.

Pour d’autres, ces fonctions, vous les maîtrisez parfaitement étant déjà membre de cette commission depuis le 26 mars 2002 date de votre première installation.

En effet, pour aborder la question de la détention provisoire sous tous ses aspects, il était indispensable que soient représentés le Conseil d’Etat, la Cour de cassation, le Barreau et l’université. Je remercie donc M. le Conseiller d’Etat DELARUE, M. le Conseiller à la Cour de Cassation ARNOULD, M. le Bâtonnier FAUGERES, Mme le Professeur CIMAMONTI et M. AUBUSSON de CAVARLAY d’avoir accepté d’être renouvelés dans vos fonctions.

Conformément au décret du 31 juillet 2001 qui régit le fonctionnement de la commission, vous avez au cours de votre réunion du 14 juin 2005, réélu M. DELARUE, Conseiller d’Etat, à la présidence de cette commission. Je saisis cette occasion pour lui adresser toutes mes félicitations.

La composition de votre commission présente le grand intérêt d’associer des parlementaires, des universitaires et des chercheurs aux personnes venant du monde judiciaire, ce qui permet d’enrichir la réflexion sur une question essentielle, au-delà de l’approche strictement judiciaire.

Je suis particulièrement préoccupé par l’ampleur du recours à la détention provisoire, qui doit être contenue dans les limites strictement nécessaires, au regard notamment du principe de la présomption d’innocence. Par ailleurs, dès lors qu’elle se trouve injustifiée, elle représente un coût indéniable, tant pour la personne poursuivie que pour la collectivité, l’indemnisation étant systématique et d’un montant de plus en plus élevé.

A cet effet, la politique pénale des parquets initiée par la Chancellerie tend à d’une part à accélérer le traitement de procédure afin d’éviter toute détention provisoire et aboutir au prononcé rapide d’une peine, d’autre part à réserver aux affaires les plus complexes les ouvertures d’informations, le plus souvent génératrices de détention provisoire.

Ainsi, en 2004, 23800 personnes ont été placées par les juges des libertés et de la détention en détention provisoire dans le cadre d’une instruction, ce qui représente un taux de 42,8% des personnes mises en examen. Ce taux est en diminution constante depuis 2002.
30321 personnes ont été placées sous contrôle judiciaire soit 54,5% des personnes mises en examen. Ce taux est en progression continue depuis 2001.

Le taux de mise en détention provisoire prononcée dans le cadre du tribunal correctionnel, le plus souvent lors d’une procédure de comparution immédiate, est également en baisse en 2004 et s’élève à 76,8% soit 20045 personnes.

C’est une voie qu’il faut poursuivre et je compte sur votre commission pour faire des propositions constructives pour continuer dans cette direction.

Depuis le début de ses travaux au printemps 2002, la commission se réunit tous les mois pour mener à bien l’exécution de ses missions, fixées par l’article 72 de la loi du 15 juin 2000.

Cette commission est chargée :

  • de réunir les données juridiques, statistiques et pénitentiaires concernant la détention provisoire en France et à l’étranger ;
  • de publier un rapport annuel des données statistiques locales, nationales et internationales concernant l’évolution de la détention provisoire ainsi qu’une présentation des différentes politiques mises en œuvre ;
  • d’établir une synthèse des décisions prises en matière d’indemnisation de la détention provisoire.

Elle a élaboré deux rapports annuels :

Le premier rapport 2002/2003 traite d’une part de l’aspect central de l’évaluation de la mise en œuvre de la détention provisoire, à savoir le recueil et l’analyse des données statistiques et d’autre part des aspects matériels de la détention provisoire.

Le deuxième rapport 2003/2004 consacre une première partie à l’actualisation des données (évolutions législatives et statistiques) relatives à la détention provisoire et à la réparation consécutive à une détention injustifiée. La seconde partie est dédiée à l’analyse de deux thèmes : le recours aux alternatives à la détention provisoire et la détention des mineurs.

Ces documents ont fait l’objet d’une diffusion à l’ensemble des directions de l’administration centrale, aux juridictions, aux organismes et associations qui en avaient fait la demande.

Pour 2004/2005, la commission a orienté ses travaux sur le contrôle de la détention provisoire. Elle a auditionné de nombreux personnels et magistrats en poste à l’administration centrale, dans les juridictions ou dans les établissements pénitentiaires (cour d’appel de Versailles, maison d’arrêt de Villepinte, etc). Elle a aussi auditionné des membres extérieurs représentants des organismes tels que le Comité européen de Prévention contre la Torture.

Pour que vous puissiez continuer à mener à bien votre travail, il me semble important que vous ayez accès à tous les services du ministère de la Justice susceptibles de vous apporter des informations sur la détention provisoire.

Parmi ces services j’en distingue quatre :

  • la direction des affaires criminelles et des grâces, car la détention provisoire est évidemment un sujet pénal suivi par cette direction. C’est d’ailleurs cette direction qui assure le secrétariat de la commission ;
  • la direction de l’administration pénitentiaire, car la mise en œuvre de la privation de liberté lui revient et vous pouvez être conduits à la questionner sur des données d’ordre statistique et sur la mise en œuvre de la détention provisoire ;
  • la direction de la protection judiciaire de la jeunesse, car il existe des sujets propres à la détention provisoire des mineurs ;
  • enfin, la direction de l’administration générale et de l’équipement sera la plus à même, par sa sous direction de la statistique, des études et de la documentation, de vous apporter les états et les études dont vous aurez besoin.

C’est pourquoi j’ai demandé à ce que ces quatre directions soient représentées au cours de cette réunion.

Je vous propose maintenant de vous laisser continuer vos travaux, mais je suis prêt cependant, ainsi que les directeurs ici présents, à répondre auparavant à vos éventuelles questions.

Je vous remercie.