[Archives] Congrès de l'union syndicale des magistrat

Publié le 15 octobre 2004

Discours de Dominique Perben, garde des Sceaux, ministre de la Justice

Temps de lecture :

14 minutes

Monsieur le Président,
Monsieur le Député maire,
Monsieur le Préfet,
Monsieur le Premier Président,
Monsieur l’avocat général représentant Monsieur le Procureur Général,
Mesdames et messieurs les élus,
Madame la Présidente,
Monsieur le Procureur de la République,
Mesdames et Messieurs les Magistrats,
Mesdames et Messieurs,


Vous avez, Monsieur le Président, évoqué avec passion des sujets importants.

Je vais vous répondre avec la même franchise et profiter de votre congrès annuel pour vous faire partager mes réflexions et mes projets.

Beaucoup se sont exprimés sur mon action, vous-même Monsieur le Président vous venez de le faire. Permettez-moi de vous dire que je suis bien sûr à l’écoute de tous et que j’attache la plus grande importance aux avis des uns et des autres. Laissez-moi toutefois vous donner ma lecture de ce qui constitue mon action.

Vous savez comme moi, et vous venez de le dire, que la justice n’a pas toujours bonne presse, qu’elle est parfois incomprise et souvent critiquée. Les Français lui reprochent son éloignement, sa lenteur, sa complexité, voire parfois son inefficacité.

Devant de telles critiques on peut se résigner. Pour ma part j’ai choisi d’agir.

Je ne vais pas revenir sur les nombreuses réformes que j’ai fait adopter par le Parlement pour parvenir à cet objectif, en tous cas pour s’en rapprocher. Vous les avez, pour partie, évoquées dans votre intervention, Monsieur le Président.

Leur objectif commun peut être résumé en une phrase : moderniser l’institution judiciaire. Il s’agit de la mettre en mesure de répondre aux défis du monde moderne. Le retard, c’est vrai, était important, les réformes ont donc été de grande ampleur.
Il est normal que de telles évolutions ne s’opèrent pas dans la facilité. Les réformes que j’ai conduites entraînent de vrais changements d’habitude. J’ai conscience de l’effort que cela représente. La Chancellerie a, pour mission, de l’accompagner. Je crois, par exemple, que les outils méthodologiques qui ont été mis à votre disposition sont de bonne qualité.

Mais après le temps des réformes législatives vient celui de la gestion, de l’administration de l’institution judiciaire. C’est à cette mission que je veux maintenant me consacrer de façon prioritaire. Cela ne signifie pas qu’il n’y aura plus d’évolutions législatives. Dans un monde en perpétuel mouvement, il ne serait pas possible de prendre un tel engagement.

Mais pour l’essentiel, ces évolutions seront de nature civile et commerciale : il y a, dans ces domaines, de grands chantiers qui nous attendent. Vous le savez la matière pénale ne devrait plus être concernée que de façon limitée, notamment en fonction des conclusions du rapport de la commission que j’ai demandé au Procureur Général VIOUT d’animer après l’affaire d’Outreau.

Je vais donc m’attacher principalement à améliorer le fonctionnement de la justice du quotidien. Cela demande des moyens mais c’est également une question d’état d’esprit, un véritable changement de perspective.

S’agissant des moyens je veux vous rappeler un certain nombre de réalités. C’est vrai que je veux offrir à tous les magistrats et fonctionnaires des conditions de travail à la hauteur de leurs lourdes responsabilités.

Je veux que les victimes comme l’ensemble des justiciables soient bien traitées.

Je veux que les Français soient fiers de leur justice.

Parce que la justice est vivante, parce qu’elle est le reflet de notre société, elle doit pouvoir constamment évoluer et s’adapter pour répondre aux exigences de son temps.

Parlons budget, les chiffres sont clairs. A mon arrivée, en 2002, le budget de la justice était de 4,7 milliards d’euros. En 2005 il s’élèvera à presque 5,5 milliards, soit 800 millions de plus en 3 ans.

Pour la troisième année consécutive le budget augmente. Pour 2005, la hausse est de 4%, ce qui fera sur 3 années, 17 %. Ce sont les chiffres en valeur absolue que je viens de rappeler. Je veux dire, ici, solennellement que, malgré les contraintes budgétaires que vous connaissez tous, les très forts engagements du Gouvernement en faveur de la justice ont été tenus.

La justice est une priorité. Ceci est vrai en programmation, c’est également vrai en exécution, malgré certaines annulations qui nous touchent comme tous les départements ministériels parce qu’il y a des contraintes budgétaires qui s’imposent à tous.

S’agissant de la hausse des effectifs, en 2005, notre Ministère totalisera à lui seul plus du tiers des créations d’emplois de l’ensemble de l’Etat, soit 1 100 sur 3 000.

Il y avait un peu plus de 67 000 magistrats et fonctionnaires en 2002, il y en aura 72 500 en 2005, soit plus de 5 300 créations d’emplois. En période de difficultés budgétaires ces chiffres sont intéressants à rappeler.

Pour améliorer le fonctionnement de la justice j’ai créé depuis 2002, 430 postes de magistrats ainsi que 1334 postes de greffiers et fonctionnaires de greffe.

En 2005, nous pourrons renforcer encore les juridictions par la création de 100 postes nouveaux de magistrats et de 255 postes de fonctionnaires, dont 90 emplois de greffiers.

Pour ne parler que des magistrats, grâce aux efforts accrus de gestion des effectifs, vous le savez, le taux de vacances de postes qui était de 6 % en 2002, sera ramené à 3 % cette année. J’ai réalisé l’objectif dont nous avions beaucoup parlé ensemble et que je m’étais fixé, supprimer les vacances chroniques de postes. Bien entendu les vacances consécutives aux transparences ne pourront pas toutes être évitées mais nous ferons en sorte qu’elles soient le plus courtes possible.

Vous m’avez remis, Monsieur le Président, des pétitions en faveur de l’élaboration d’un nouveau calendrier du mouvement annuel de magistrats.

Les difficultés résultant d’une information tardive des magistrats ne m’avaient pas échappé. Je suis conscient des délais nécessaires pour préparer les activités des uns et des autres. Il faut adopter un calendrier et s’y tenir.

La circulaire adressée aux juridictions le 7 octobre dernier prévoit que pour des prises de fonctions en septembre 2005, la transparence sera diffusée en février, ce qui n’est pas si simple à faire, puis soumise au CSM dès la fin du mois d’avril. Soyez assurés de ma volonté et de celle de Monsieur Davost.

C’est je crois une réponse claire à votre préoccupation, comme l’est également celle que j’ai apportée à la question lancinante des retards pris dans les notifications des avancements d’échelon.

Tout le monde reconnaît que désormais ces notifications interviennent rapidement.

La prime modulable est maintenant entrée en application. Vous savez que c’était la contrepartie, je le dis et je le répète, nécessaire à la très forte augmentation de vos primes que j’ai obtenue (+ 8 % en 2 ans et encore 1% en 2005).

J’ai bien entendu les critiques formulées parfois de façon discrète ou parfois plus appuyée. J’ai demandé à la Direction des Services Judiciaires de me faire un bilan de cette première année d’application et de perfectionner les outils méthodologiques mis à la disposition des chefs de cour à qui je reconnais avoir confié une tâche dont ils se seraient volontiers dispensés. Il était évident qu’en aucune façon il appartenait à la Chancellerie de fixer les critères d’attribution de ces primes.

Contrairement à ce que j’ai pu lire ou entendre, les primes modulables ne constituent pas une atteinte à l’indépendance des magistrats.

Ce type de primes modulables existé déjà pour des magistrats d’autres juridictions, vous pourrez en parler avec eux, sans que cela apparaisse comme une atteinte à leur indépendance.

Les crédits de fonctionnement des juridictions connaissent, de leur côté, en 2005, une progression globale de 7% soit 16 millions d’euros.

Sous mon impulsion, ces crédits ont augmenté de 20 % en trois ans.

On arrive à de vraies évolutions qui devraient se percevoir de façon concrète sur le terrain. Mais il faut savoir que les loyers de l’immobilier pèsent lourd dans notre budget de fonctionnement.

*

*   *

Au-delà des moyens quelles perspectives ?

Si les moyens sont importants, ils ne sont pas tout, loin de là. Moderniser l’institution c’est aussi se fixer de nouveaux objectifs. A travers ceux-ci, c’est également le profil du juge de ce siècle qu’il s’agit de dessiner.

S’agissant des nouveaux objectifs, lorsque je suis arrivé Place Vendôme en mai 2002 j’ai demandé aux services les statistiques de l’activité judiciaire. On m’a remis celles de l’année 2000. C’est à dire que la Chancellerie n’était dotée d’aucun outil de pilotage lui permettant une réactivité à court terme. C’est intéressant de connaître les statistiques de l’année N moins 2 mais ça ne permet pas de piloter les choses de manière efficace.

Cette réactivité de l’institution judiciaire est, pour moi, un objectif primordial.

Depuis le mois de mai, j’ai fait élaborer des statistiques d’activité de toutes les juridictions. Désormais elles me sont communiquées chaque fin de trimestre.

Quand l’examen des statistiques révèlera un problème quelconque, cela me permettra, je pense, d’y remédier au plus vite et en tout cas de dialoguer sur les difficultés que l’on pourra détecter dans telle ou telle juridiction.

Soit ce peut être une difficulté à traiter par l’administration centrale ou par la cour d’appel comme le renfort en magistrats placés ou bien encore l’affectation de magistrats et de greffiers supplémentaires.

Soit ce peut être le révélateur d’une difficulté propre à la juridiction, d’un problème d’organisation interne. Les chefs de cour et de juridiction, qui seront prévenus beaucoup plus vite, pourront alors prendre les mesures les plus adaptées.

Ce système étant maintenant fiabilisé, j’ai demandé que les résultats soient communiqués à l’ensemble de ceux qui ont des responsabilités, en administration centrale comme dans les juridictions. J’ai attendu 3 trimestres pour que les documents soient fiabilisés et je remercie celles et ceux qui ont contribué, en juridiction, à leur élaboration. C’est un élément de transparence pour les juridictions.

A l’objectif de réactivité doit être associé celui de célérité.

Pour accélérer le cours de la justice, j’ai engagé une réflexion sur nos procédures civiles et pénales.

Vous avez évoqué, monsieur le Président, la réforme du divorce. Celle-ci entrera en vigueur le 1er janvier 2005 et les textes d’application sont en train de sortir. Je l’ai souhaitée car je sais que cette réforme est très attendue par les Françaises et les Français.

J’ai voulu simplifier la procédure tout en respectant la volonté des parties. C’est ainsi que les divorces par consentements mutuels aboutiront très vite à un jugement. De même la liquidation du régime matrimonial sera facilitée.

La simplification des procédures est pour moi une composante de la modernisation, elle participe de l’exigence de qualité du service public.

Un décret simplifiant la procédure civile est intervenu le 20 août dernier. Il marque le point de départ d’un processus irréversible et entraîne des modifications en profondeur au niveau de la mise en état ou de l’exercice des voies de recours.

J’ai aussi confié à Monsieur Jean-Claude Magendie, Président du Tribunal de Grande Instance de Paris, une mission spécifique sur « la célérité et la qualité de la justice».

Son rapport m’a été remis. Je crois qu’il comporte des propositions audacieuses très intéressantes et pour certaines d’entre elles de nature à permettre d’améliorer sensiblement le traitement des affaires civiles et pénales.

J’ai décidé d’entamer une large concertation qui permettra de déboucher sur de réelles avancées.

Je pense également qu’il est nécessaire de mettre la justice au diapason de l’Europe. Vous y avez fait allusion, Monsieur le Président, et vous avez eu raison.

En effet, la modernisation de la justice c’est l’adaptation de notre arsenal juridique aux standards européens.

Les équipes communes d’enquêtes permettent, par exemple en matière de terrorisme, aux autorités judiciaires françaises de travailler en véritable synergie avec leurs homologues européens.

Les autorités judiciaires françaises et espagnoles ont ainsi créé, le 15 septembre 2004, une première équipe commune d’enquête, chargée de mener des investigations en France et en Espagne, sur le mouvement terroriste ETA. Ce premier dispositif n’est pas étonnant, c’est avec l’Espagne que la coopération est la plus naturelle. Cette coopération interviendra bientôt avec d’autres pays.

Deuxième évolution, le mandat d’arrêt européen. La France a remis 107 personnes dont 35 ressortissants français et a reçu des autres pays de l’Union Européenne 66 personnes recherchées par la justice.

Enfin les 8 pôles criminalité organisée mis en place le 1er octobre permettent désormais aux magistrats français de lutter contre les mafias dont l’activité ne se limite pas aux frontières de notre pays.

Je rappelle que ces dispositions sont entrées en application 77 magistrats, 85 greffiers et 50 agents de catégorie C ont déjà été localisés dans les pôles.

S’agissant des moyens immobiliers, la période de montée en puissance progressive de ces pôles sera mise à profit pour finaliser leur installation. Dans certains tribunaux c’est déjà chose faite. Dans d’autres il existe des installations provisoires mais je sais que les appels d’offres et marchés ont tous été lancés il y a plusieurs mois. Il s’agit d’opérations qui nécessitent des délais de réalisation. Tout est mis en œuvre pour que ceux-ci soient très brefs.

J’ai également voulu que les magistrats affectés dans les pôles bénéficient de solides connaissances, vous l’avez rappelé monsieur le Président, en matière économique et financière, en matière de réseaux de criminalité organisée et d’entraide répressive internationale.

Des formations spécifiques ont donc été organisées par l’ENM tant au niveau national qu’au niveau déconcentré.

Je voudrais évoquer, comme vous l’avez fait vous-même, quel sera le juge de ce siècle.


Vous avez bien compris qu’en dessinant ces perspectives, je dessine également le portait du magistrat de ce siècle. Réactif, rapide et rompu à l’internationale, le juge du XXIe siècle présentera également d’autres caractéristiques.

je pense qu’il doit être un animateur d’équipe

Je suis, en effet convaincu que l’avenir est dans la constitution d’équipes organisées autour des magistrats.

Le nouveau statut des greffiers assistants renforcés des magistrats qui a été mis en place à compter du 1er juin 2003 prévoit une extension de leurs missions en matière de recherches juridiques, de mise en état des dossiers et de participation à la rédaction des décisions, sous les directives des magistrats.

Une expérimentation est en cours dans plusieurs juridictions, au civil comme au pénal et j’ai demandé à l’inspection des services d’évaluer ce nouveau dispositif. Cette évaluation est en cours. Nous aurons l’occasion d’en reparler.

Le magistrat du XXIe siècle sera un magistrat professionnel, soyons clairs la dessus.

J’ai entendu vos inquiétudes sur l’institution des juges de proximité. Je veux vous dire, très simplement, que ces inquiétudes ne sont pas fondées.

La justice de proximité répond à un objectif : mieux associer les Français au fonctionnement de leur justice. Il faut que les Français s’approprient leur justice. Vous avez suffisamment dit qu’il y a une crise, il nous faut trouver dans la bonne foi réciproque des procédures nouvelles.

Je suis convaincu qu’à côté de la magistrature professionnelle il y a une place pour une magistrature non professionnelle.

Prenons le temps de regarder autour de nous ce qui se fait depuis fort longtemps, des juges non professionnels. Pourquoi la France devrait-elle se priver de l’expérience de ceux qui souhaitent donner du temps à l’institution judiciaire ?

Le Conseil Supérieur de la Magistrature est très attentif aux nominations qu’il fait en matière de juges de proximité.

Ce magistrat dont j’essaye avec vous de dessiner le profil sera également un magistrat recentré sur ses missions.

Je considère que les magistrats n’ont rien à faire dans la plupart des commissions administratives où ils siègent actuellement.

On a obtenu une première victoire. L’ordonnance du 1er juillet 2003 a porté retrait des magistrats des 11 premières commissions administratives et j’ai bon espoir. D’autres retraits interviendront d’ici la fin de l’année et, à terme, ce sont plus de 50 commissions qui seront concernées.

Je pense en fin, et c’est un sujet beaucoup plus grave que le magistrat du XXI ème siècle est un magistrat humain et responsable.

Je veux, à ce stade de mon discours, vous parler de l’affaire d’Outreau.

Ce procès a eu un retentissement considérable et ses conséquences se feront sentir pendant plusieurs années encore.

Il nous faut en tirer les enseignements car il est de l’intérêt de tous que nous regardions les choses en face. En ce qui me concerne, je veux comprendre ce qui s’est passé pour faire en sorte que si des améliorations sont nécessaires, elles soient réalisées. C’est aussi simple que ça.

Naturellement j’ai d’abord pensé à la souffrance des enfants martyrisés et violés et à la façon pour le juge d’appréhender, de vivre, cette réalité tangible. J’ai déjà eu l’occasion de le dire, c’est difficile sur le plan psychologique et humain et il faut le vivre.

J’ai aussi décidé de recevoir à leur demande les sept acquittés. Ce geste en leur direction m’apparaissait nécessaire. Je prends chaque jour plus conscience de cette réalité et je souhaite que les média ne caricaturent pas les choses.

Il s’agissait pour moi, d’une démarche d’humanité à l’égard de personnes gravement mises en cause dans leur honneur qui avaient été privées de liberté dont la vie avait été bouleversée.

L’expression de l’émotion doit nécessairement déboucher sur des perspectives d’action. J’ai entendu des critiques sur l’instruction, sur l’expertise, sur la détention provisoire, sur la sacralisation de la parole de l’enfant, sur les conditions dans lesquelles elle est recueillie, sur les assises, sur le rôle des média….

J’ai donc demandé à Monsieur VIOUT, procureur général, de s’entourer de professionnels reconnus, d’examiner les choses de façon très précise et de tirer les enseignements du traitement judiciaire de l’affaire d’Outreau.

Il ne s’agit ni d’une commission paradisciplinaire chargée de rechercher d’éventuels manquements professionnels, ni d’une instance de réévaluation de la procédure.

J’ai tout simplement demandé à Monsieur VIOUT et aux professionnels qui l’entourent de me faire des propositions concrètes de nature à améliorer le traitement des affaires judiciaires importantes.

Par ailleurs mes services travaillent activement avec les avocats des acquittés pour parvenir dans les meilleurs délais à une juste indemnisation. Ce travail est conduit tout à la fois avec sérénité, dignité et aussi avec détermination.

Vous l’avez indiqué tout à l’heure, Monsieur le Président, cette affaire a remis en lumière la question de la responsabilité des magistrats.

La question n’est pas iconoclaste et je crois qu’on ne peut pas l’écarter d’un revers de main.

Elle doit être posée sincèrement mais elle mérite mieux que des réponses simplistes.

On ne peut pas dire comme je l’entends parfois que les magistrats bénéficient d’une impunité. Le juge n’est pas irresponsable.

D’abord ses décisions peuvent faire l’objet de multiples voies de recours.

Il existe aussi une responsabilité de l’Etat pour dysfonctionnement du service public, la responsabilité pour faute personnelle du magistrat dans l’exercice de ses activités juridictionnelles, la responsabilité pénale du magistrat et enfin la responsabilité disciplinaire devant le Conseil Supérieur de la Magistrature.

Chaque année je saisis le Conseil Supérieur de la Magistrature lorsque j’estime que des comportements relèvent de sa compétence. J’assume mes responsabilités.

Les chefs de cour ont aussi la possibilité de saisir directement le CSM. Il leur appartient également d’assumer pleinement cette responsabilité nouvelle pour eux. Ils le font avec le concours de la Chancellerie comme cela a été le cas dans un dossier qu’a eu hier à connaître le CSM.

Prenons garde, en revanche, à ce qu’en voulant aller trop loin dans la recherche de la responsabilité du juge, on ne lui rende pas tout simplement impossible l’exercice de ses fonctions.

Le juge doit être responsable mais il ne doit pas être soumis à des actions dont l’objet serait de tenter d’influer sur sa décision, voire de le déstabiliser.

Je veux vous dire que dans ce débat aussi ce qui doit nous guider c’est la recherche des conditions d’une justice sereine et c’est ce que je vous dis ici. J’ai déjà eu l’occasion de le dire ailleurs et je le répèterai autant que nécessaire.


Conclusions

Je veux, pour terminer, vous dire que, pour vivre au quotidien au rythme de l’institution judiciaire, je sais qu’elle fonctionne beaucoup mieux qu’on ne le dit et d’une certaine façon en vous écoutant, vous donnez une image plus négative de la justice que celle que je ressens. Depuis 2 ans et demi chaque mois qui passe me donne une image plus positive.

C’est précisément parce que j’ai conscience de la qualité du travail que vous accomplissez jour après jour que je veux ouvrir la justice vers l’extérieur. L’institution a tout à gagner à fonctionner plus directement sous le regard de nos concitoyens.

Vous avez intérêt à ouvrir la maison. Nous sommes dans une société médiatique. Ce n’est pas un choix, c’est une nécessité. Il est indispensable que nous fassions mieux connaître notre institution.

Si vous ne deviez retenir qu’un message de ce discours c’est celui-ci : montrez ce que vous faites, expliquez le, faites œuvre de pédagogie.

Merci de la passion avec laquelle vous exercez ce très difficile mais très beau métier de magistrat.

Je vous remercie.