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Publié le 06 juin 2019 - Mis à jour le 10 juillet 2024

La nature a-t-elle des droits ? En consacrant le préjudice écologique dans son arrêt « Erika » du 25 septembre 2012, la Cour de cassation répond oui à cette question. Concrètement si on lui porte atteinte, on répare.

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Rappel des faits et de la procédure

Le 12 décembre 1999, l'Erika, pétrolier Total, fait naufrage au large de la Bretagne. Une gigantesque marée noire souille les côtes françaises, du Finistère à la Charente-Maritime, et des milliers d'oiseaux mazoutés périssent. Un désastre écologique encore présent dans les esprits qui a coûté cher. Qui doit payer ?

Le 12 février 2007, un procès s'ouvre afin d'identifier les responsabilités. Parmi les accusés le capitaine, le propriétaire de l'Erika et les dirigeants de Total qui avaient loué ce navire. Ce dernier, à la limite de l'obsolescence avec plus de 20 ans de service, s'est brisé en deux lors d'une tempête. Les sept années d'enquête ont démontré que la fatalité n'était en rien la cause du naufrage.

En première et deuxième instance, le propriétaire du navire et Total sont lourdement condamnés à verser des dommages intérêts dont une partie au titre du préjudice écologique mais un pourvoi en cassation est formé.

Après des années de procédures, le 25 septembre 2012, la chambre criminelle de la Cour de cassation rejette le pourvoi dans son intégralité, confirme la responsabilité de Total et valide le principe jurisprudentiel du préjudice écologique. Le groupe pétrolier est condamné à payer une amende pénale de 375.000 € et 200 millions d'euros de réparations civiles.

Préjudice écologique

Pendant le procès Erika, la notion est apparue en première instance, elle s'est renforcée en appel et a été consacrée par la Cour de cassation. Aujourd'hui, elle est inscrite dans le code civil.

Article 1247 : « Est réparable, dans les conditions prévues au présent titre, le préjudice écologique consistant en une atteinte non négligeable aux éléments ou aux fonctions des écosystèmes ou aux bénéfices collectifs tirés par l'homme de l'environnement. »

De manière synthétique, le préjudice écologique désigne les dommages causés à la nature. Néanmoins deux critères doivent respectés : la victime n’est pas l’homme mais la nature ensuite le préjudice concerne seulement des atteintes non négligeables à l’environnement. Toutes les atteintes ne sont pas attaquables juridiquement car par principe l'activité humaine porte atteinte à l’environnement (construction, activité économique...). Il reviendra au juge, lors du procès, de définir au cas par cas si le dommage peut être considéré comme négligeable ou non.

En reconnaissant le préjudice écologique, la jurisprudence « Erika » a provoqué un petit raz de marée juridique. La nature a enfin un statut juridique lui permettant de se défendre ou d'être défendue.