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Une mobilisation sans précédent contre les violences conjugales

Publié le 01 octobre 2020 - Mis à jour le 01 mars 2023

En introduction à notre dossier consacré aux actions entreprises par la Justice dans le cadre du Grenelle des violences conjugales, Isabelle Rome, haute-fonctionnaire à l’égalité femmes-hommes du ministère revient sur l’action volontariste de l’administration centrale et des juridictions pour lutter contre ce fléau.

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Quelle part a pris le ministère de la Justice dans le combat contre les violences conjugales ?

La lutte contre les violences conjugales a fait l’objet d’une mobilisation sans précédent au sein du ministère de la Justice, à tous les niveaux et à tous les étages. Au sein de chacune des directions de l’administration centrale et sur l’ensemble du territoire, dans les juridictions, au sein des services pénitentiaires et en partenariat avec les associations... Cette mobilisation s’est inscrite dans la volonté du Président de la République de choisir l’égalité femmes-hommes comme grande cause du quinquennat. L’une des concrétisations de celle-ci a été l’organisation du Grenelle des violences conjugales par le Gouvernement entre septembre et novembre 2019. Les directions de l’administration centrale se sont particulièrement mobilisées en fournissant des outils de mise en œuvre de cette politique comme le Guide pratique de l’ordonnance de protection (DACS), le Guide pour le traitement juridictionnel des violences conjugales (DSJ), les fiches Focus de la DACG, et tout le travail mené par l’IGJ autour des retours d’expériences et des fiches pratiques aidant à la reprise de l’activité après COVID.

Ces dernières ont accompagné également le travail législatif en vue de l’élaboration des deux lois du 28 décembre 2019 et du 30 juillet 2020, de leurs décrets d’application ainsi que des circulaires. Tout cela dans un calendrier très serré. Elles ont également conçu et réalisé de nouveaux outils de protection comme le bracelet anti-rapprochement. Cette impulsion très forte donnée par le ministère s’est traduite aussi dans les faits par le déploiement exponentiel du téléphone grave danger (TGD). Alors qu’en février 2019, il y avait environ 300 téléphones attribués, en août 2020, on en comptabilisait plus de 1100.

Concrètement quelles ont été les grandes avancées du Grenelle des violences conjugales ?

Nous observons des avancées concrètes et nombreuses. Le phénomène d’emprise est désormais pris en compte dans la loi. Le secret médical est réformé afin de permettre aux soignants, s’ils en ont l’intime conviction, de porter à la connaissance du procureur le fait que la victime est dans un état de danger immédiat et/ou d’emprise, même sans son accord. La médiation pénale comme alternative aux poursuites est désormais interdite dans les procédures de violences au sein du couple. Une restriction forte à la médiation à titre familial est appliquée également dans ce cas. La notion de suicide forcé est entrée dans le code pénal par la répression du harcèlement moral au sein du couple ayant conduit la victime à se suicider ou à tenter de la faire. Autre changement d’importance : l’exercice de l’autorité parentale du conjoint violent est plus fortement questionné car on a davantage conscience des graves conséquences des violences intrafamiliales sur les enfants. Des dispositions nouvelles ont ainsi été prises en ce sens : suspension de l’exercice de plein droit de l’autorité parentale en cas d’homicide de l’autre parent, nécessité pour le juge de rendre une décision motivée sur l’exercice du droit de visite et d’hébergement lorsqu’il y a placement sous contrôle judiciaire avec interdiction d’entrer en contact avec la victime. La politique pénale privilégie aujourd’hui l’éviction du conjoint violent (sauf volonté contraire de la victime), ce qui renverse les pratiques car auparavant, c’était la femme en danger qui partait.

Et au niveau des juridictions ?

Les juridictions se sont également pleinement investies sur ce sujet, notamment pendant la période du confinement où de nombreux conjoints violents ont été déférés par les procureurs et évincés du domicile conjugal. Un volontarisme s’est exprimé chez les chefs de juridiction pour développer la procédure de l’ordonnance de protection notamment par l’élaboration de projets de juridiction. Il y a une volonté manifeste d’accélération des procédures par la mise en place de la filière d’urgence dans les tribunaux afin que dès le dépôt d’une requête ou d’une plainte, il y ait une prise en charge prioritaire de ces violences. Aujourd’hui nous avons les cadres et les outils nécessaires. Il faut les diffuser au maximum et surtout ne pas relâcher la pression sur cette question qui cause tant de dégâts au sein des couples, des familles et de notre société toute entière.